Août 2011 Mission de formation infirmière en soins intensifs, hygiène et prophylaxie

En 2011, l’HGR allait être doté d’un service d’urgences et de soins intensifs, grâce à l’aide octroyée par le Fond Européen de Développement (FED)
Pour pouvoir ouvrir ce nouveau service, Sœur Claire, le médecin directeur, a souhaité qu’une formation soit donnée au personnel soignant, pour pouvoir créer une équipe infirmière compétente.
C’est ainsi que Patricia Taminiau, enseignante et infirmière hygiéniste, et Félicien Tshidimba, psychologue et infirmier urgentiste sont partis vers Kabinda pour y effectuer une première mission infirmière du 7 au 21 août 2011
Après avoir parcouru des kms de savane, sur une route plus praticable qu’à l’accoutumée, on arrive dans la localité : Kabinda.
Devant l’hôpital, il y a beaucoup de monde, on dirait un marché !
Le lieu est fort fréquenté, des motos arrivent, d’autres repartent avec une personne sur le porte bagage. Il faut dire qu’ici, la moto joue le rôle de taxi ou d’ambulance !


L’ensemble de l’hôpital a été construit dans les années cinquante, au siècle dernier. L’emplacement choisi était à l’extérieur de la localité, à proximité d’un cimetière. Aujourd’hui, il semble être planté au milieu de Kabinda. C’est que la population du district à augmenté prodigieusement suite à l’afflux des personnes venant du Shaba tout proche où ils travaillaient dans l’ancienne Union Minière (Gécamines aujourd’hui) et dont ils furent chasés.
Quand on pénètre dans l’enceinte de l’hôpital, on voit du monde partout : à l’ombre des manguiers, sous les kiosques, devant les pavillons de soins. Une petite visite à l’intérieur des services montre partout du matériel obsolète, mais qui fonctionne.
L’accueil enthousiaste que nous avons reçu lors de notre arrivée, nous a vite fait oublier les incidents du parcours. Nous avons passés une soirée gaie et animée avec la communauté. Nous avons établi avec sœur Claire, l’horaire des séminaires, la journée commençait à 8h pour se terminer à 16h30 avec une pause d’une heure entre midi et 13h. Cet horaire était valable du lundi au samedi.
Les membres de cette mission infirmière ont pour but d’apporter sur place, à moindre coût, l’information dont les soignants locaux ont besoin pour assurer avec compétence l’accompagnement des malades. Les sujets traités sont élaborés sur base des demandes émanant du terrain enrichis des observations faites par les formateurs lors de leur discussion avec le personnel soignant.

En ce qui concerne les soins d’urgence et la réanimation, les matières enseignées furent les suivantes : Réanimation cardiorespiratoire, intubation endotrachéale, placement d’une perfusion centrale, exécution d’un ECG, utilisation d’un défibrillateur, contenu d’un chariot d’urgence. Chaque exposé était suivi dans la mesure du possible de séances d’exercices pratiques. Toute la matière prévue n’a pas pu être enseignée, vu le nombre de groupes qui devait assister à chacune des formations et le temps nécessaire pour effectuer les exercices pratiques.

Dés le 3ème jour des infirmiers responsables des centres de santé ont rejoint le séminaire. Ce sont eux qui sont en première ligne pour être appelés à pratiquer ce genre d’intervention. Les médecins eux-mêmes ont demandé à se faire exposer certaines des matières abordées, pour permettre une remise à niveau de leurs connaissances
II. En ce qui concerne l’hygiène et la prophylaxie, Patricia Taminiau est passée dans tous les services en intervenant là où elle voyait que c’était nécessaire. Voici ses réflexions en fin de mission
 L’hôpital n’est pas propre ! Les exigences qu’il faut avoir vis –à vis de toutes les catégories professionnelles ( tant les nettoyeuses qui ne font que racler de l’eau , mais ne nettoient pas, les « hygiénistes » qui manquent de rigueur en laissant poules et chèvres dans l’hôpital et laissent les familles rentrer sans limite à l’intérieur de l’hôpital, les infirmières chefs d’unité qui ne jouent pas toujours leur rôle de chef, le directeur de nursing que l’on sent dépassé par ses responsabilités et pas toujours conscient de tout ce qu’il y a à faire dans un hôpital. Tout cela induit un fonctionnement incohérent et peu efficace mais qui pourrait être amélioré facilement en mettant chacun devant ses responsabilités professionnelles
 Pendant notre séjour, des mesures ont été prises : on a évacué tous les animaux de l’enceinte de l’hôpital, les femmes de ménages ont été formées au nettoyage efficace avec brosses à récurer et savon, les « hygiénistes « ont été encouragé à faire respecter le règlement. Il faudrait instaurer un plan d’attaque pour le nettoyage. Dans cette optique j’ai envoyé à sœur Claire mes protocoles de nettoyage de mon institution qui pourraient servir de guide pour élaborer les leurs.
 Au niveau soins, un cours concernant les différents pansements a été prodigué afin qu’ils puissent utiliser ceux en leur possession et dont ils ignoraient l’utilisation. Des tours pansements ont été organisés pour la mise en pratique des cours donnés
 J’ai également évalué avec sœur Elizabeth les désinfectants en leur possession et conseillé de ne plus acheté un savon soi-disant « désinfectant » venant de Kinshasa et dont l’étiquette ne portait aucune formule , ni aucune indication d’utilisation et suggéré d’opter plutôt pour un savon de base produit par les sœurs Clarisse ( en même temps on fait fructifier la production locale), nettement moins cher et d’utiliser les sommes épargnées pour acheter un bon désinfectant dont l’efficacité n’est pas mise en doute. Ici : Dettol et eau de Javel. !!! Il est utile d’apprendre à les utiliser correctement, au bon dosage. Personnellement le Dettol n’est pas mon maître achat, c’est un phénol, un vieux désinfectant, il existe beaucoup mieux, beaucoup plus efficace et surtout moins toxique, mais je ne sais pas si cela pourrait être disponible par ex à Kinshasa et livrable à Kabinda Quant à l’Eau de Javel, elle reste très efficace contre les virus et pas cher, mais toxique et pas excellente pour l’environnement ……. En attendant on fait avec parce qu’elle peut servir pour la désinfection des sols, du linge, du matériel qui n’est pas en inox.
 En ce qui concerne les antiseptiques à utiliser pour les patients il faut d’une façon ou d’une autre leur procurer les 2 maîtres achats : Isobétadine: le meilleur et qui existe parce qu’à large spectre et existe en différentes présentations (dermique, alcoolique, gynécologique,

buccal, ophtalmologique, en gel, en tulle) et la Chlorhexidine pour les gens allergiques à l’Isobétadine, ou souffrant de troubles thyroïdiens et pour les enfants en-dessous de 36 mois (pour ne pas perturber le fonctionnement de leur thyroïde). Nous avons aussi fait le tour de la pharmacie et éliminé ce qui était périmé.
 Une grande importance doit être accordée à l’éducation des patients dans différents domaines (diabétologie, soins aux nouveaux nés et aux enfants, hygiène personnelle….) Il serait utile d’avoir une infirmière qui ne ferait que ça, qui aurait un tropisme particulier pour l’enseignement et qui connaisse bien la population.
 Une urgence concerne la mise à disposition de solution hydro-alcoolique ou mieux une aide à la fabrication locale de ce produit en suivant la recette de l’OMS (!! après renseignement l’eau oxygénée n’est pas nécessaire, mais l’émollient oui et l’absolue nécessité d’avoir de l’alcool à 80°. Or il s’avère que l’appareil pouvant le distiller au bon degré est cassé! La fabrication locale existe par exemple au Rwanda ;
Ceci est indispensable pour un hôpital qui est un hôpital de référence En effet l’hygiène des mains est la base de la sécurité dans les soins pour tous, tant pour les patients que pour le personnel. Actuellement leur alcool ne titre que 48° ce qui est insuffisant. Cette technique sert tout le temps avant et après la prise en charge d’un patient mais aussi pour la désinfection chirurgicale des mains des chirurgiens avant une intervention chirurgicale. La solution de ce problème est incontournable et urgente. Inutile d’opérer quelqu’un s’il meurt d’infection par non observance d’une hygiène des mains correcte !
OBSERVATIONS :
Notre séjour sur place nous a permis de relever certains points qui nous semblent importants de soumettre à la réflexion de tous : A notre avis, il y a 3 aspects dans l’aide à apporter à l’hôpital de Kabinda
1. Modernisation et agrandissement de l’hôpital (FED)
2. Aide au renouvellement du matériel de soins et à l’équipement des salles (FED+AAI)
3. Aider à la formation permanente du personnel soignant (AAIB)
Nous avons observé que l’ensemble du personnel soignant : infirmiers, aides-soignants, techniciens et médecins est composé de gens de bonne volonté et intéressés par les formations proposées.
L’hôpital manque parfois du matériel nécessaire pour soigner, les bâtiments méritent une rénovation. Heureusement le 10ème FED (Programme du fond européen de développement en faveur de la santé) prévoit non seulement d’ajouter à l’ensemble hospitalier un service pour les soins intensifs, et un autre pour les soins d’urgence, mais également à rafraîchir les bâtiments existants. Il prévoit le renouvellement des fenêtres et des portes, du carrelage dans certains services, la modernisation de la cuisine, la construction d’une maison pour accueillir les familles qui accompagnent leur malade.

Le travail des infirmiers devient de plus complexe et exigeant. Dans les pays nantis, tout le personnel infirmier a l’occasion de participer aux colloques, congrès, formations et séminaires organisés à leur intention. De cette manière, ils bénéficient d’une formation permanente dont personne ne conteste aujourd’hui l’utilité. Toutes ces formations, bien que nécessaires, sont difficilement réalisables dans un pays comme le Congo qui doit faire face à des carences de tout genre.
Il faut pouvoir continuer à apporter des possibilités de formation pour le personnel soignant qui n’a aucune possibilité dans ce domaine sur place.
Le temps de formation de 2 semaines est insuffisant. Il ne faut pas seulement transférer le savoir, le savoir-faire et la compétence, il faut aussi :
 Travailler au management infirmier  Collaborer avec les écoles infirmières existantes  Améliorer l’organisation des services et des soins  Aider à former un personnel de cadre compétent
Participation à l’étude du projet d’amélioration des bâtiments et équipements par le 10è FED
Pour finir sur une note positive et réjouissante, lors de notre séjour nous avons vu arriver un architecte dont le bureau avait emporté l’appel d’offre initié par les Communautés Européennes pour moderniser, agrandir, mettre aux normes et équiper l’hôpital de Kabinda afin qu’il devienne un véritable centre de référence pour toute la région. Sont compris dans ce même budget de plusieurs millions de dollars 2 plus petits hôpitaux périphériques ainsi que les centres de santé dépendant de Kabinda et qui vont tous bénéficier de ce lifting plus que nécessaire. Les travaux débuteraient dès que les élections seront passées et s’il n’y a pas trop de problèmes suite à celles-ci. Durée des travaux programmés : 1 an. En principe, l’architecte utilisera les gens du cru comme ouvrier ce qui est tout bénéfice pour les populations locales qui pourront améliorer leur quotidien en travaillant sur ce chantier. Nous avons pu donner notre avis et nos conseils à sœur Claire et à l’architecte venu examiner les lieux et prévoir les travaux à réaliser, en ce qui concerne :
1. Construction et aménagement des services : a. Soins intensifs b. Urgences 2. Suggestions pour la rénovation des autres services a. Salle d’hospitalisation b. Cuisine c. Buanderie 3. La construction d’une maison pour les familles accompagnantes 4. L’amélioration de l’approvisionnement en eau pour l’ensemble du site 5. La résolution du problème des toilettes 6. Amélioration globale de l’hygiène à l’hôpital 7. Prise en charge pédagogique et d’animation pour les enfants hospitalisés.