Les forçats de la piste ou une histoire de vélos

D’un effort à un autre !

Dans la brousse de la province du Kasaï, il y a bien quelques rares camions qui font du transport de marchandises, mais ce n’est pas sans risque sur les pistes défoncées. Ils peuvent s’embourber, verser dans les fossés profonds, casser la mécanique. Le dépannage peut alors prendre plusieurs jours, voire des semaines ou des mois ! Ainsi des lieux jalonnent la piste, portant de drôles de noms : 80, 250 … il ne s’agit pas de mesures kilométriques, mais du nombre de jours où un camion a attendu d’être dépanné avant de repartir. Certaines carcasses dépouillées présentes depuis longtemps, témoignent que la réparation n’est pas toujours possible !

Il existe une alternative à ce transport … le vélo ! En effet il passe partout, il évite les ornières boueuses et se joue des obstacles les plus inattendus. Mais à quel prix ?

Tout le monde le sait le vélo n’avance pas seul ! D’ailleurs ce vélo n’est pas fait pour les compétitions, ni pour transporter des personnes, ou pas seulement. Il sert au transport des marchandises, parfois il fait office d’ambulance. Et pour ce type de trafic en tout genre, il est solide !

 Leur heureux propriétaire marche à côté et pousse. Ces convoyeurs de 2 roues font un pénible trafic depuis les villages qui produisent, charbon de bois, maïs, huile de palme et légumes, vers les marchés des grands sites urbains. Chargés d’un fardeau qui pèse jusqu’à 5 fois leur propre poids, ces hommes font 150 km en 5 à 7 jours, parfois sous des pluies diluviennes et pour un revenu dérisoire. Quand le trafic commercial ne marche pas bien dans une région, ces « forçats de la piste » vont dans une autre direction et n’hésitent pas à faire en plusieurs semaines des centaines de km loin de chez eux.

Comme dans tous les lieux de souffrance où l’engagement physique est exigeant, la solidarité s’organise toujours. Quand le marcheur arrive au pied d’une côte avec son fardeau, il n’est pas rare de voir un compère, souvent un inconnu, s’arrêter, laisser là sa charge, pour aider, tel un Simon de Cyrène, celui qui doit gravir son Golgotha. A charge pour celui qui est secouru d’offrir, une autre fois, ses forces pour aider celui qui peine sous le poids du fardeau à roue.

Autrefois il y avait en France les « forts » des halles, aujourd’hui il y a encore des « forts », ceux de la piste en Afrique. Ils méritent considération pour leur courage et leur détermination.

Récit extrait de l’ouvrage

Pour l’amour de la vie -Fioretti de présences humanitaires par Jean-Claude Michel, publié aux  Editions des Béatitudes au profit d’AAI
http://www.editions-beatitudes.com/f/index.php?sp=liv&livre_id=875

L’ouvrage est disponible dans les librairies religieuses de Belgique et sur des sites de vente en ligne. Voyez plus de détails en tête de page.