Ce récit s’intéresse à une réalité inattendue et inconnue pour les européens que nous sommes.
L’eau, familière et tellement utile, qui abreuve, lave et rafraîchit, est un bien précieux dont nul ne peut se passer. Pourtant cette eau ne s’offre pas de la même façon à tout le monde.
Il y a l’eau courante, celle qui coule avec force dans les tuyaux de nos maisons. Nous y sommes tellement habitués que nous ne pouvons pas imaginer qu’il puisse en être autrement. Savons-nous qu’il y a aussi l’eau portée péniblement sur les chemins de brousse. Elle remonte lentement et avec peine, par des sentiers abrupts ou sur des marches mal taillées à flanc de colline, portée dans des bidons de plastique qui peuvent peser jusqu’à 20 kilos sur la tête de femmes de tous âges.
A Kabinda, l’eau courante est rare comme dans beaucoup de pays d’Afrique et d’Asie. A l’évidence, ici comme ailleurs, l’eau se trouve toujours dans les points bas quand elle n’est pas cachée sous terre. L’eau des sources et des fontaines coule toujours au pied de collines, mais elle n’y remonte jamais seule. C’est normal selon les lois physiques de la gravité, mais anormal pour ceux qui ont en tellement besoin !
L’eau n’est pas juste avec tout le monde ! Elle coule et s’échappe, elle fuit quand elle n’est pas domptée. Quand elle se laisse trouver et capter, elle devient un don précieux, comme à Kabinda. Là elle vaut une fortune. L’eau, et la vie qu’elle nourrit, ont un prix élevé, celui de l’effort presque surhumain de femmes et de jeunes filles qui chargent sur leur tête ce bien si précieux et si lourd, qui écrase les vertèbres et fait plier le dos. Le corps ainsi accablé, qui vacille et qui cherche des appuis secourables pour éviter la chute, ne perd pas sa dignité. Au contraire, chaque pas est vécu comme une victoire, il est l’occasion de dire « c’est dur mais je vis, l’effort à fournir est surhumain, mais d’autres vivront avec cette eau » !
En haut du chemin, à l’arrivée dans le village, il y aura le soulagement certes, mais se savourera aussi le bonheur d’avoir réussi et d’avoir comblé les siens de ce bien si précieux qui sera consommé avec parcimonie.
Récit extrait de l’ouvrage
Pour l’amour de la vie -Fioretti de présences humanitaires par Jean-Claude Michel, publié aux Editions des Béatitudes au profit d’AAI
http://www.editions-beatitudes.com/f/index.php?sp=liv&livre_id=875
L’ouvrage est disponible dans les librairies religieuses de Belgique et sur des sites de vente en ligne. Voyez plus de détails en tête de page.